20 - 21/01/2007
Frères et soeurs bien-aimés, Après de multiples mois passés à attendre que la neige arrive, j’ai fondu. Il est vrai que sans neige ni vent glacial, l’hiver ne résonnait pas des mêmes cantiques que les autres années, n’est-ce pas ? Pourtant, un souffle neuf semble plâner par-dessus les eaux. Peut-être est-ce la fin de semaine approchant qui donna naissance à cet optimisme de forcené, peut-être tout simplement la vitamine C, qui devint depuis quelques semaines ma plus fidèle amie. Quoiqu’il en soit, nous voici à nouveau réunis, par ces liens aussi forts qu’invisibles qui se rient des distances et des desseins, par-delà ces différents acquis relatifs à nos choix de vie respectifs. Car si le pain consacré, élevé, sanctifié, magnifié ne semble pas évoquer la communion à tous - et personne ne les blâmera pour cela, si ce n’est quelques charismatiques enjoués - la prière qui est à la source de cet appel divin et de la réponse que nous lui offrons nous réunit sans doute comme nul autre moyen. Rien de magique ici, mais plutôt une intuition. Comme un nez qui chatouille ou des synchronicités trop bien réglées. La communion, mes amis, reste ce lien fragile à toujours fortifier dans le temps. Cette chose insaisissable qui rassemble dans son impalpabilité, qui fédère même les aspirations les moins zélées. Une communion d’hommes et femmes en chemin, qui chacun à leur manière, cherchent à percer le mystère de la sainteté, ou à concilier vie quotidienne et fondamentaux de la spiritualité. Entre un prêtre polonais, catholique qui plus est, qui se refuse à jouer le jeu de la tradition, un diacre aux allures d’ambassadeur bien loin de tout sérieux professionnel et une Eglise chinoise qui recommence à déconner, rien ne va plus ! Sauf qu’à côté des rancoeurs partagées, de ces conneries médiatisées et autres erreurs impardonnables, mais amplifiées, existent ces cellules communionnelles et forcément mystiques auxquelles nous appartenons. Nul besoin de s’appesantir sur de telles élucubrations : la systémique nous a montré depuis longtemps l’importance d’un cercle de référence et son impact sur notre développement. Conscients ou inconscients, nous voici donc entraînés une fois encore, sur les chemins de la réflexion … Pour ceux qui ne le sauraient pas, nous sommes entrés cette semaine dans Alors on en arrive à faire copain-copain avec nos anciens ennemis du Kremlin, mais à éviter tout contact avec les pères fondateurs des Droits de l’Homme et de la libre-pensée. Frères et sœurs, à l’image de certains comités remarquables, je plaide ici haut et fort pour que l’œcuménisme naisse, se développe et perdure grâce aux petites gens que nous sommes. Lorsque nous n’aurons plus la sécurité d’une Eglise et de ses ministres, nous constituerons-nous en Eglises de maison, ou tendrons-nous la main à nos frères oubliés ? Par la grâce de Dieu, n’en arrivons pas là. Vous seriez étonnés de voir combien de conférences, de concerts, de réunions de prière sont organisés conjointement par les confessions environnantes, et combien cela est riche, de s’ouvrir à la multitude. Une leçon qui vaut bien un fromage d’extensions, sans doute. Puisque la règle s’applique à tous, par tous et en tous. Dans nos familles, nos boulots, nos asbl, nos villages, notre épicier, notre caissière, notre voisin. Discours immuable s’il en est, mais ô combien nécessaire d’être entendu. Encore, et encore. Mai ’68 (en mémoire à ceux qui m’ont précédé), la révolution culturelle chinoise, l’Art Nouveau, les Eglises libres : à une exception près, ce n’est pas le pouvoir qui a changé le monde. C’est un gosse devant un char, un vieil indien qui a jeûné. Le monde vous appartient, par quoi allez-vous donc commencer ? Facile à dire, en effet. Alors, et si la tâche vous semble trop ardue, commencez-donc par sourire. Et respirez un bon coup. Histoire d’offrir un visage souriant aux attaques des mauvais qui parfois vous cernent, histoire d’offrir un peu de paix à ce monde qui en a bien besoin. Rappelez-vous que de toutes les maladies, l’amour est sans doute la meilleure. Pourquoi ? Parce qu’elle est infiniment contagieuse … Louange donc soit faite à tous ceux et celles qui, au jour le jour, offrent les mains et les visages d’un amour assumé, partagé, libéré ! Cette Semaine est aussi l’occasion de nous attarder sur un passage de Marc (vous devriez l’avoir lu, c’est le plus court) : « Il fait entendre les sourds et parler les muets ». Ou l’inverse, pourquoi pas. Rappelez-vous : Jésus fait sa tournée miraculeuse et en vient à cracher dans la boue pour en recouvrir les oreilles du sourd qui se plaint. Tadam ! Le sourd entend. Dans ce miracle très populaire, Jésus non seulement nous égare en préparant une mixture pas très ragoûtante, mais surtout nous démontre une fois de plus qu’il est le Verbe. Lorsque le Verbe est entendu, toutes choses deviennent possibles ; voilà bien le message global de ce passage. En se mettant sérieusement à l’écoute de A nous de voir ce qui au fond de nous, a besoin d’être encore guéri. Vous en aurez déjà fait l’expérience, j’en suis sûr : une parole juste et avisée, couplée à une écoute attentive fait souvent plus de bien qu’une thérapie choc. Certains de nos échecs relationnels ne sont-ils d’ailleurs pas dus à une parole mal placée ? Une blessure dans notre parcours n’a-t-elle déjà été cicatrisée par une parole pesée ? En nous mettant à l’écoute de Pour terminer, j’aurais aimé vous faire part du décès de Lida Hensley, la seconde épouse de Kirby. Si ce nom ne vous évoque pas grand-chose, retenez seulement que c’est grâce à ces deux utopistes qu’aujourd’hui, je me présente devant vous avec tous les privilèges d’un ministre du culte. Si j’habitais en ce moment aux Etats-Unis, j’aurais même droit à ma place de parking gratos. Clergy oblige. Kirby, illettré, a vogué de congrégation en congrégation. Son amour de l’universel n’ayant pas été bien reçu, ses trop nombreuses questions frisant l’hérésie, il a opté pour l’utopie. Une Eglise internationale, sans frontières d’aucune sorte, basée sur le sacerdoce universel et ouverte à tous, sans discrimination. Un bien joli projet, qui a fait rire à l’époque, avant de se mettre la loi à dos, pour enfin compter aujourd’hui pas loin de 20 millions de ministres ordonnés. Allez savoir pourquoi, je garde un profond respect pour ce petit bout d’homme, qui du fond de sa ville agricole, a rassemblé tous les marginaux de la planète. Et pas juste autour de vaines discussions, mais autour de Dieu, et de ses alternatives. Sa seconde épouse a aujourd’hui rendu l’âme, et laisse derrière elle un grand gamin qui se fait une joie de prendre le relais. Rien ne changera, pourtant. Et c’est tant mieux. Que Dieu vous garde en son sein pour les jours et semaines à venir, et que l’ange de And everybody says : Amen !
Votre Prieur